Page:Féval - Le Bossu (1857) vol 1-3.djvu/279

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
55
LE BOSSU.

gen ! ne souriez pas ainsi, prince, ou vous me rendriez folle !

Elle se plaça devant lui, et, d’un ton qui n’admettait plus de faux-fuyants :

— Si vous ne m’aimez pas, que voulez-vous de moi ?

— Je veux vous faire heureuse, dona Cruz, répondit Gonzague doucement, — je veux vous faire heureuse et puissante…

— Faites-moi libre d’abord ! s’écria la belle captive en pleine révolte.

Et, comme Gonzague cherchait à la calmer :

— Faites-moi libre ! répéta-t-elle, libre ! libre !… cela me suffit… je ne veux que cela !

Puis, donnant cours à sa turbulente fantaisie :

— Je veux Paris !… je veux le Paris de vos promesses !… ce Paris bruyant et brillant que je devine à travers les murs de ma prison… Je veux sortir… je veux me montrer partout. À quoi me servent mes parures entre quatre murailles ? Regardez-moi !… Pensiez-vous que j’allais m’éteindre dans mes larmes ?

Elle eut un retentissant éclat de rire.

— Regardez-moi, prince ; me voilà consolée… je ne pleurerai plus jamais, je rirai toujours, pourvu qu’on me montre l’Opéra, dont je ne sais que le nom, les fêtes, les danses…