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LE BOSSU.

» Je suis là, plus seule que jamais, car Henri a plus d’affaires à Paris qu’ailleurs. — C’est à peine si je le vois aux heures des repas.

» Il m’est défendu de sortir. Je dois prendre des précautions pour me mettre à la croisée.

» Ah ! s’il était jaloux, ma mère ! comme je serais heureuse de lui obéir, de me voiler, de me cacher, de me garder toute à lui. — Mais je me souviens de la phrase de Madrid :

» — Ce n’est pas pour moi, c’est pour vous !

» Ce n’est pas pour moi, ma mère. — On est jaloux seulement de celle qu’on aime !…

» Je suis seule ! À travers mes rideaux baissés, je vois la foule affairée et bruyante. Tous ces gens sont libres.

» Je vois les maisons de l’autre côté de la rue. À chaque étage il y a une famille : des jeunes femmes qui ont de beaux enfants souriants. Elles sont heureuses.

» Je vois encore les fenêtres du Palais-Royal, bien souvent éclairées le soir pour les nobles fêtes du Régent.

» Les dames de la cour passent dans leurs chaises avec de beaux cavaliers aux portières.

» J’entends la musique des danses.

» Parfois mes nuits n’ont point de sommeil…

» Mais si seulement il me fait une caresse,