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CHAPITRE XI.

L’ÂME DE BLUTHAUPT.

Albert et Goëtz atteignaient l’extrémité de l’avenue de Bluthaupt lorsque Otto les rejoignit. Au lieu de suivre la grande allée, qui montait par une pente douce et régulière jusqu’au château, les trois frères tournèrent à gauche et traversèrent l’ancien village, dont les ruines éparses se confondaient maintenant avec le gazon, sous le froid linceul qui couvrait toute la campagne voisine. — Le schloss leur apparut bientôt avec sa lourde ceinture de murailles, que surmontaient les toits aigus et confusément groupés de ses donjons. Ils y arrivaient par derrière, et d’un côté qui ne présentait aucun accès praticable. — Pour gagner cette porte antique par où s’étaient introduits, le soir précédent, Mosês, Regnault et le Madgyar, il fallait faire tout le tour des douves.

Cette partie des remparts était basse et masquait à peine le rez-de-chaussée des bâtiments intérieurs. Les murs, bâtis sur le roc nu, et dominant à pic un ravin profond, n’ajoutaient rien ici à la force de la vieille citadelle ; la nature s’était chargée de la défendre de ce côté contre toute approche hostile, et les massifs bastions, élevés sur les trois autres faces par la main de l’homme, étaient des jeux d’enfants auprès de ce gigantesque rempart, qui se dressait à deux cents pieds du sol, et défiait aussi bien la sape que l’échelle.