leur et menaçant murmure qui avait empli ses oreilles, au moment où il posait en Amour.
Il restait tout près de cette foule ennemie, qui l’avait si impitoyablement bafoué naguère, pour perdre ainsi sur-le-champ sa terreur.
Pendant le court silence qui suivit la conclusion du marché, il hasarda un timide regard du côté de Johann.
— Le dâb n’a pas l’air à son aise, dit Mâlou.
— Je crois qu’il voudrait bien décoller le plafond (s’esquiver), ajouta Pitois.
Johann but son verre de rhum et se leva.
— Ça peut se faire, dit-il, entre honnêtes gens, il ne faut qu’une parole… nous sommes d’accord.
— À peu près, répliqua Mâlou ; reste à trinquer comme de vrais amis.
Il prit le verre plein du chevalier, et le lui présenta galamment.
— Bourgeois, dit-il en mettant le revers de sa main à son oreille, — j’oserai vous offrir le coup de gargari…
Reinhold trempa ses lèvres dans le verre de rhum.
— Et puis, ajouta Pitois avec un sourire aimable, — il y a les petites arrhes…
— Que vous faut-il ? demanda Johann.
— La moindre chose… un chiffon de cinq cents à partager.
Le chevalier mit sa main sous sa blouse et prit dans la poche de son paletot blanc un riche portefeuille de chagrin à fermoir d’or qu’il ouvrit.
Ses doigts tremblaient.
Les deux échappés du bagne n’avaient pas assez d’yeux pour regarder ce portefeuille.
Reinhold en sortit un billet de cinq cents francs qu’il leur donna. Pitois et Mâlou purent remarquer que ce billet n’était pas seul.
Ils se confondirent en remerciements.
— Voilà un bon petit dâb !… s’écria Mâlou, en mettant les cinq cents francs dans sa poche. — Il n’y avait pas à dire… on se ferait hacher pour lui menu comme de la chair à pâté !… pas vrai, Blaireau ?