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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/726

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Franz se mordit la lèvre et ses sourcils firent mine de se froncer. Mais, au lieu de cela, il prit la taille de Gertraud en se jouant.

— Eh bien ! petite sœur, s’écria-t-il, puisque vous voulez absolument que je vous le dise, je compte sur vous, je ne compte que sur vous !

— Bon Dieu ! dit la jeune fille en riant, — quelle puissante protection vous avez là, monsieur Franz !

— C’est la meilleure, et vous le savez bien, puisque vous m’avez montré le néant de toutes les autres… Vous avez un si excellent cœur !

— Bon ! interrompit Gertraud, je ne suis plus méchante… Voilà les compliments qui vont venir !

— Vous savez que je vous aime tant ! reprit Franz, et que j’aurais une joie si vraie à vous rendre la pareille !

Gertraud faisait ce qu’elle pouvait pour garder son petit air moqueur ; mais Franz était un heureux enfant, dont la voix savait d’instinct les routes tortueuses qui descendent au cœur de la femme.

Dès qu’il le voulait bien, on ne lui résistait plus.

En ce moment, d’ailleurs, il plaidait une cause gagnée d’avance. Gertraud avait pour Denise uns affection dévouée, et rien ne lui disait de combattre le sentiment qui l’entraînait vers Franz.

Son âme toute franche et toute bonne ne demandait qu’à s’ouvrir.

— Vous irez vers elle, reprit le jeune homme ; je sais que vous irez, petite sœur… Vous lui direz combien je souffre loin d’elle, et combien j’ai besoin de la voir…

Le sourire de Gertraud se fit plus espiègle en ce moment, parce que le coucou suspendu à la muraille rendit ce bruit faible qui annonce l’heure une ou deux minutes à l’avance.

Elle regarda le cadran ; l’aiguille allait marquer neuf heures.

Franz ne put pas deviner ce que signifiaient ce regard et ce sourire.

— Vous la prierez, continua-t-il ; — vous la supplierez, de ma part, à genoux…

— Seigneur !… comme vous y allez !…

— Est-ce que vous me refuseriez ?

— Je crois que oui.

— Gertraud !