— Tous ceux qui entrent dans son trou le détestent et le maudissent… Il y a bien des malheureux dans le Temple, mais vous n’y trouveriez pas une seule main pour toucher la sienne.
— Il est riche ?
— On le dit.
Rodach se retourna vers Hans ; il avait l’air pensif et intrigué.
— Je suis fâché de n’avoir pu l’apercevoir, pensa-t-il tout haut. Dites-moi un peu, ami Dorn, comment est fait ce personnage ?
— Est-ce que vous auriez vraiment l’idée de vous adresser à lui ? demanda Hans.
— Peut-être.
Le marchand d’habits hocha la tête d’un air de répugnance.
— Ce serait une démarche vaine, dit-il ; Araby ne prête que sur gagea et joue la pauvreté, comme tous ses pareils.
— Vous ne m’avez pas répondu !… interrompit Rodach.
— C’est que j’ai bien peu de chose à répondre… À peine ai-je entrevu par hasard un coin de son visage jaune et ridé sous la grande visière de sa casquette…
— Une casquette de peau ? interrompit encore Rodach, dont la curiosité devenait inexplicable pour le marchand d’habits.
— Une casquette de peau.
— Après ?
— Il est petit, chétif, caduc, tremblotant…
— Ensuite ?
Les questions de Rodach se succédaient toujours plus vives, et un intérêt puissant se lisait dans son regard.
— Une houppelande presque aussi vieille que lui, répondit Hans, et par-dessus la houppelande, un manteau court…
Le front de Rodach s’inclina durant deux ou trois secondes : il parut réfléchir profondément, puis sa haute taille se redressa tout à coup.
— Conduisez-moi chez cet homme, dit-il.
— Gracieux seigneur, balbutia Hans, avez-vous donc pris au sérieux des paroles que je regrette ?…
Un geste impérieux de Rodach l’arrêta, et il dut obéir en silence.