— Certes !… dit bien bas le docteur.
— Assurément !… balbutia le jeune M. de Geldberg.
Reinhold, moins explicite, osa cependant tousser affirmativement.
— C’est le cas de dire, fit observer meinherr Van-Praët, que l’on ne peut pas contenter tout le monde.
— Et il m’étonne, ajouta madame de Laurens, que M. le baron de Rodach vienne justement faire parade de sa victoire, en présence des personnes qu’il a dépouillées… C’est à n’y pas croire !
— Belle dame, répondit Rodach, la maison de votre père a grand besoin d’argent… mettez que vous avez rempli un devoir filial, et consolez-vous dans la paix de votre conscience.
— Il y a du vrai là dedans, reprit Van-Praët, et notre chère petite Sara pourra toujours compter avec la succession de son excellent père !… mais nous !
— Vous êtes les alliés naturels de la maison, répondit Rodach ; vous suiviez une fausse voie… je n’ai fait que vous rendre à vous-mêmes.
Le Madgyar n’avait pas encore ouvert la bouche. À part l’effort qu’il faisait sur lui-même, il semblait qu’une main mystérieuse fût là pour le mater.
Il était maintenant le plus troublé de tous. Son regard si audacieux d’ordinaire, ne se fixait sur le baron qu’à la dérobée.
Parfois, sa prunelle, agrandie tout à coup, prenait une expression d’irrésistible effroi.
Il se détournait alors brusquement comme pour fuir une vision obsédante ; en ces moments, on eût dit qu’il voyait derrière M. le baron de Rodach un autre personnage, vivant dans ses souvenirs.
Van-Praët s’étonnait de son silence et se disait que ces vantards bruyants, hommes de pistolets et de sabres, sont toujours les premiers à capituler ; Sara contemplait maintenant les formes herculéennes du Madgyar avec une surprise dédaigneuse.
Quant aux trois associés de Geldberg, plus le temps passait, plus ils s’applaudissaient ; leur partie devenait réellement magnifique et cet allié précieux changeait leur défaite en victoire.
Ils en étaient à se louer de la venue simultanée de leurs adversaires,