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CHAPITRE VI.

PETITE.

Otto venait de faire sonner sa montre ; il était deux heures après minuit.

La chaise de poste allait toujours comme le vent.

La nuit était opaque et profonde.

— Que ne donnerais-je pas pour savoir au juste où nous sommes ! murmura-t-il ; mon Dieu ! si nous allions arriver trop tard !

— Si nous n’avons pas de mauvais relais à la frontière, répliqua Goëtz, et si nous trouvons des chevaux tout prêts à Obernburg, je garantis que nous arriverons à temps.

— Dieu vous entende, mon frère ! dit Otto.

Puis, il ajouta de ce ton d’un homme qui veut tromper son inquiétude :

— Voyons, Albert, achevez votre récit.

— Il est achevé, répondit Albert. Vous savez maintenant pourquoi le Madgyar vous a parlé de son honneur outragé… Pauvre Éva ! peut-être a-t-elle payé bien cher son dévouement !…

Il poussa un gros soupir.

— Pauvre Éva, dit-il encore, je lui avais dit : À demain ! Mais nos jours sont comptés ; il fallait partir… et je ne la reverrai jamais !

Il se tut.

— Bah ! s’écria Goëtz ; un verre de vin, mon frère !… qui sait ce que