Elle était plus charmante que jamais ; et certes, nul n’aurait pu deviner ce qu’il y avait au fond de son cœur.
Parfois seulement sous l’arc lustré de ses grands cils, une flamme sournoise s’allumait.
Ceux qui l’auraient vue alors auraient senti du froid dans leurs veines, c’était comme la langue agile et venimeuse du serpent, qui se montre à demi sous de gracieuses fleurs gaiement épanouies.
Elle sortit de sa chambre, sans dire un seul mot à Batailleur.
Le docteur Saulnier, qui était en Allemagne pour veiller à la santé de M. de Laurens, habitait une chambre voisine de l’appartement de ce dernier.
C’était chez lui que Sara se rendait.
— Docteur, dit-elle en l’abordant, vous me voyez tout inquiète.
Saulnier, surpris par cette visite inattendue, lui avança silencieusement un fauteuil.
On sait que le jeune médecin voyait en elle un ange de douceur et de vertu.
— Je viens vous consulter, reprit Sara, qui se laissa choir entre les bras du fauteuil.
— Pour vous, madame ?
— Plût à Dieu !… Mais non, c’est toujours pour mon pauvre Léon, que je vois souffrir sans cesse et que nous ne pouvons soulager.
— Il faut espérer, madame… commença le docteur.
— Pendant que j’y pense, interrompit Petite avec cette vivacité des gens qui veulent fixer au passage un souvenir fugitif, je serais bien aise de vous adresser une question… Nous reviendrons tout à l’heure au véritable sujet de ma visite.
— Entièrement à vos ordres, répliqua Saulnier.
— Asseyez-vous là, près de moi, docteur… N’avez-vous pas été, ce soir, chez cette femme que j’ai prise tout récemment auprès de moi ?
— Il n’y a pas plus d’un quart d’heure que j’en suis sorti.
— Pauvre Batailleur !… Voilà des années qu’elle est à mon service et je m’intéresse tout particulièrement à elle… Vous avez vu sa fille ?
— Oui, madame.