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Page:Féval - Le Jeu de la Mort, volume 1 - 1850.djvu/68

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LE JEU DE LA MORT

58 LE JEU DE LA MORT.

peul ainsi s’exprimer ; moi, je donnerais ma vie pour que Dieu vous gardât de tout mal.

Jean de la Mer ne répondit pas ; mais sous les flots épais de sa barbe blanche, un sourire heu- reux se glissa.

— Allume deux bougies et donne-moi ma loupe, dit-il; fût-ce pour la dernière fois, il faut que je lise encore!

Berthe alluma deux bougies, et trouva en tâtonnant sur le guéridon une grosse lentille montée en or qu'elle tendit au vieillard.

Celui-ci la regardait toujours ; el, sur cette face rude, que l'approche des dernières heures rendait plus austère encore, il y avait comme un vaguc attendrissement.

— Tu m'aimes, disait-il, c'est peut-être vrai. car tu es la seule créature humaine en qui je n'aie jamais découvert une pensée mauvaise. Tu m'aimes. Et qu'ai-je fait pour toi? Je t'ai donné du pain... comme une aumône.. Je ne, t'ai rien donné que du pain, car tu n’as pas même un nom, pauÿre Berthe.

Il l’attira tout près de lui.

— Écoute, murmura-t-il, serais-tu bien heu- reuse d’avoir un nom, Berthe ? |

— Un nom?... répéta la jeunc fille comme si elle n’eût pas compris.