Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/134

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le bon écuyer arpentait sa chambre et demandait à son honnête cervelle un moyen de retrouver le fils de Treml.

Alix, de son côté, cherchait en vain le sommeil et combattait la fièvre, car elle avait souffert ce soir. Elle ne voulait point interroger son cœur et son cœur parlait en dépit d’elle : elle se souvenait. Elle avait cru autrefois qu’on la payait de retour. Jusqu’alors elle n’avait vu d’autre obstacle entre elle et le bonheur que son devoir ou la volonté de son père. Maintenant, c’était un abîme qui s’ouvrait devant elle : Didier l’avait oubliée.

Enfin, dans l’appartement privé de M.  de Vaunoy, dont la double porte était fermée avec soin, trois hommes étaient réunis et tenaient conseil. C’étaient M.  de Vaunoy lui-même, Alain, son maître d’hôtel, et le valet Lapierre.

Alain était maintenant un vieillard. Sa rude physionomie, sur laquelle l’ivresse de chaque jour avait laissé d’ignobles traces, n’avait d’autre expression qu’une dureté stupide et impitoyable.

Lapierre pouvait avoir de quarante-cinq à cinquante ans. Son visage ne portait point le caractère breton. Il était en effet originaire de la partie méridionale de l’Anjou. Jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, il avait exercé çà et là la respectable et triple profession de marchand de vulnéraire, avaleur de sabres et sauteur de cordes.

À cette époque, il parvint à entrer comme valet de pied dans la maison de Mgr  de Toulouse, qui n’était point encore gouverneur de Bretagne.

Lapierre avait alors avec lui un jeune enfant qui n’était point son fils et dont il se servait pour attirer le pu-