Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/107

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Je ne sais comment avaient fait les deux Bergamasques. Soit qu’ils fussent doués d’une agilité particulière, soit que les terribles intrus n’eussent point affaire à eux, ils avaient pris la clef des champs dès le commencement de la bagarre, emportant avec eux, comme c’était leur droit, les chausse, les pourpoints et les manteaux du conseiller et de maître Mathieu.

Ceux-ci restaient à la merci de leurs persécuteurs. Les coups de plat tombaient dru comme grêle avec ce bruit que rend l’aire campagnarde aux jours d’automne où on bat le blé. Nos deux compères n’osaient pas crier, sentant leur cas détestable.

Ils ignoraient d’ailleurs complètement à qui ils avaient affaire et attribuaient le régal qu’on leur offrait à M. le baron de Gondrin-Montespan, sans doute averti par la trahison des Bergamasques. Étourdis, aveuglés, perdus, ils recevaient sans mot dire cette averse de bourrades qu’on leur distribuait dans le plus profond silence. On eût dit vraiment que les deux bourreaux y allaient pour leur plaisir. Ces grandes diablesses d’épées montaient et retombaient en mesure, se trompant quelquefois de sens et fendant un petit peu par mégarde, car il y avait du sang sur la poudre blanchâtre qui recouvrait le sol.

Au bout de deux grandes minutes, et après un demi-cent de solides horions, Mathieu Barnabi, qui tournait comme un rat musqué dans sa cage, trouva enfin une issue pour fuir. C’était une ouverture communiquant avec l’intérieur de la bâtisse. Il s’y lança à corps perdu, buta contre un