Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/134

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— Vous êtes une belle âme, répliqua Mazarin dont les yeux noirs chatoyèrent, et vous méritez de réussir.

— Voici, continua le Bergamasque, le joli abbé Mezzetin, domestique du grand prêtre, grand connétable et grand vizir qui vient ici d’Italie pour pêcher en eau trouble et qui trouve la comtesse Colombine fort à son gré. Un peu de musique !

Il y eut un murmure dans la salle. Deux ou trois voix s’élevèrent pour dire :

— Le sorcier en voudrait-il à ce freluquet de Mazarin ?

Personne, en vérité, n’y eût trouvé à redire, excepté M. de Mazarin lui-même.

Mais ce remarquable homme d’État s’occupait en ce moment à tourner et retourner entre ses doigts avec un frémissement d’aise la cédule payable chez le surintendant du roi.

Il n’avait garde d’écouter la comédie et s’étonna franchement d’un accès de gaieté qui prit la noble foule à ce moment.

Cet accès de gaieté était produit par une déclaration d’amour amphigourique, débitée par l’abbé Mezzetin à la comtesse Colombine, avec l’accent bien connu de M. le cardinal de Mazarin, nous dirions presque avec sa propre voix, tant l’imitation était parfaite.

Tout le monde ici entrait désormais dans l’allusion, excepté le petit roi qui se divertissait des ombres chinoises elles-mêmes, madame de Pardaillan, tout entière à l’accomplissement d’un désir passionné, et M. de Mazarin, absorbé par sa cédule.