Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/137

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Pendant le silence qui suivit cette question, la bonne voix de ce coquin de Mitraille s’éleva de l’autre côté de l’écran et dit :

— Par la mort-dieu ! ceux qui disent du mal de madame Éliane n’ont qu’à venir : ils trouveront à qui parler !

— Quelqu’un a juré en notre présence, dit encore Louis XIV, offensé, non pas pour Dieu, mais pour sa propre majesté en bas âge.

Tout le monde se tut.

Il y a des hommes dont le destin est de réussir par l’aversion même qu’ils inspirent. La haine de tous les porte en quelque sorte et les soutient au-dessus de l’eau.

Entre tous ceux-là, le cardinal de Mazarin est un des plus curieux exemples que puisse présenter l’histoire.

À part la reine de France, qui avait pour lui une affection mêlée de rancune, l’histoire ne lui reconnaît pas un ami.

Ce qui ne l’empêcha point de traverser, en retombant toujours sur ses pieds, l’une des époques les plus troublées de la monarchie.

Personne ici n’avait rien contre notre belle Éliane, mais tout le monde, pour divers motifs, abhorrait M. le cardinal de Mazarin. La haine, sentiment actif, noie toujours la passive indifférence.

Madame Éliane servit de fouet pour frapper sur le dos de Mazarin. Chacun crut qu’elle était réellement sa complice.

Hélas ! juste à cette heure, la pauvre charmante femme longeait avec lui des corridors qui me-