Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/157

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— La faute en est à l’amour…

— Qui perdit Troie ! l’interrompit M. de Gondrin. Sur ma foi ! la petite était encore dans le sein de sa mère quand vous me jouâtes ce bon tour, Renaud, mon mignon.

— Ce fut la mère d’abord, balbutia Saint-Venant, puis la fille.

— Alors, dites : la faute en est aux amours. Vous êtes un charmant compère, Renaud, et du diable si je ne fais pas votre fortune !

— Ne raillez pas, monsieur le baron, supplia le conseiller du ton le plus humble. Ce serait railler un vaincu, ce serait railler un homme mort.

Gondrin tira de sa poche le parchemin que M. de Beaufort lui avait remis la veille.

— Non-seulement je ne raille pas, dit-il en prenant un accent sérieux, mais encore je compte vous offrir des garanties. Veuillez prendre connaissance de cette pièce.

Saint-Venant, comme tous les hommes de sa sorte, savait lire une page d’un seul regard.

— Vous avez le pied sur ma tête, dit-il : lieutenant de roi ! et dans le Rouergue encore ! Monsieur mon ami, pour payer ma rançon, je consens à vous révéler des choses que vous n’auriez jamais devinées, quand même vous seriez gouverneur d’une grande province, au lieu d’être lieutenant de roi dans ce trou.

— Voilà ce qui vous trompe, monsieur mon ami, interrompit Gondrin. Vous n’avez rien à m’apprendre. Je sais tout, absolument tout, et mon estime pour vous s’en est singulièrement augmentée.