Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/170

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éloignée de moi, parce que M. de Saint-Venant m’a demandé, a exigé sa main…

— Quoi ? votre amant d’autrefois !… s’écria la reine.

— Il croit que ma fille est unique ; il évalue son héritage à six millions tournois.

M. de Mazarin fit une corne à la page de son carnet qui contenait le nom du conseiller de Saint-Venant.

— Et maintenant, reine, reprit Eliane, qui tendit ses mains jointes vers l’alcôve, la menace de cet homme est sur moi. Je lui ai refusé la main de ma fille comme je lui avais autrefois refusé ma propre main, parce qu’il me fait peur et horreur. Il va se venger, il va me dénoncer ; il l’a déjà fait peut-être, car M. le baron de Gondrin-Montespan payerait cher la connaissance de ces secrets. Le baron est héritier à défaut de nous ; il a déjà engagé autrefois contre nous une action judiciaire…, je me mets à vos genoux, reine, – Éliane se prosterna ; — une malheureuse, menacée comme je le suis du déshonneur et de la ruine, ne peut pas dire à son fils : je suis ta mère ! Elle ne peut pas même garder sa fille sous son toit. Rendez-moi, oh ! rendez-moi mes deux enfants et je vous bénirai jusqu’au dernier jour de ma vie !

La reine était touchée jusqu’à un certain point.

— Que peut-on faire pour cette pauvre femme ? demanda-t-elle en se tournant vers le cardinal.

À son tour M. de Mazarin était distrait. Il songeait peut-être que son stage de chrysalide avait assez duré et qu’il était temps de s’éveiller papillon.

Il tressaillit.