Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/279

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Elle n’avait point poussé de cri ; elle ne savait plus : elle était morte.

Un seul être au monde aurait pu venir à son secours, car celui-là n’avait pas besoin d’être averti : il était témoin, — mais celui-là ne voulait pas.

En sortant de l’oratoire, le conseiller heurta ce coquin de Mitraille, appuyé contre le mur et creusant sa cervelle vide pour savoir s’il avait bien ou mal fait d’introduire Saint-Venant auprès de sa dame. Celui-ci l’entraîna, disant :

— Que faites-vous là, capitaine ? À votre poste, malheureux ! Ne quittez pas la garde de la porte avant l’heure fixée pour la capitulation ; et que personne n’entre, surtout !

— J’étais resté là, répondit Mitraille, pour être à portée si madame Éliane appelait. Vertubleu ! monsieur le conseiller, ce n’est pas la confiance que j’ai en vous qui m’étouffe ; et au moindre mot de madame la comtesse, je vous aurais saigné comme un chapon !

— Capitaine, répliqua gravement Renaud, dans quelques heures, madame la comtesse vous dira elle-même ce que j’ai fait pour elle, et vous vous repentirez de ces paroles que je vous pardonne de bon cœur. Allez à votre devoir et veillez. Moi, je n’ai pas encore achevé ma besogne de cette nuit.

À ces derniers mots, il s’éloigna brusquement, laissant ce coquin de Mitraille l’homme du monde le plus embarrassé.

— J’ai la tête froide ! se dit le bon garçon en grattant tour à tour ses deux oreilles jusqu’au