Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/121

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vaux et Gaston galopa à la portière. La chaise de poste traversa ainsi tout Paris et sortit par la barrière de la Villette, suivant désormais le chemin de Strasbourg.

Gaston les conduisit fort loin. Il était nuit noire quand il tourna bride.

Le mendiant et la pauvresse avaient repris leurs postes et attendaient toujours. Vers dix heures du soir, la pauvresse vint trouver le mendiant.

— Le diable s’en mêle ! dit-elle.

— Attendons, répondit son camarade, plus patient, d’une voix de basse taille qu’il avait : c’est le bon moment et l’endroit est propice. Il ne passe pas un traître chat, dans cette rue de l’Université ! Nous pouvons nous asseoir maintenant des deux côtés de la porte.

À peine avaient-ils pris place sur ces bancs hospitaliers qui accompagnent l’entrée d’un grand nombre d’hôtels, dans le faubourg Saint-Germain, que le pas d’un cheval se fit entendre au loin. Notre couple déguenillé ne prêta aucune attention à ce bruit : ce n’était pas un cavalier qu’il attendait.

Le cavalier s’approcha et s’arrêta juste en face de la porte cochère fermée. Le mendiant et la pauvresse se tinrent chacun dans son coin, jusqu’au moment où le cavalier cria d’une voix impérieuse :

— La porte !

Alors ils tressaillirent tous deux, la pauvresse et le mendiant. D’un même saut, ils furent sur leurs pieds ; d’un autre bond, aux côtés du cheval Gaston fut saisi par les deux jambes, terrassé, poignardé et fouillé du haut en bas en un clin d’œil.

C’étaient des gens du métier qui allaient en besogne lestement. Ils eurent fini avant l’arrivée du concierge.

— Rien ! dit le mendiant en se relevant.

— Rien ! répéta la pauvresse avec un blasphème.

La porte cochère s’ouvrait. La pauvresse et le men-