Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/96

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Il y avait un secret dans cette maison. Naguère encore, avant que le nom de l’aîné eût été prononcé, rien n’expliquait dans la physionomie du manoir les demi-mots et les mélancoliques réticences du père Géraud, l’honnête aubergiste de Redon.

C’était une famille paisible : deux époux, jeunes encore, qui s’aimaient de la tendresse un peu trop calme du mariage.

Maintenant, les paroles de l’aubergiste prenaient un sens. Sous cette paix, on découvrait une sourde souffrance, et le mystère d’un drame de famille se montrait à demi derrière le rideau soulevé.

Madame était devenue pâle comme une statue d’albâtre, et ses yeux baissés ne regardaient plus l’Ange, qui dormait toujours.

Le maître de Penhoël, qui avait jeté d’abord sur l’oncle Jean un coup d’œil de reproche, examinait maintenant sa femme avec une attention sournoise. Ses sourcils se fronçaient, et des rides se creusaient sous ses cheveux.

L’oncle Jean appuyait sa tête blanche sur sa main. Le passé l’absorbait ; il semblait se perdre dans de lointains souvenirs, où il y avait de la joie et des larmes.

Cyprienne et Diane, vaguement effrayées, avaient perdu leurs jolis sourires. Elles regar-