Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/98

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Puis encore, éveillée par le silence, peut-être autant que par son rêve, elle se dressa, effrayée, en poussant un faible cri.

En voyant s’ouvrir ses yeux bleus, doux comme l’amour d’un enfant, on eût compris pourquoi la poésie des bonnes gens de Bretagne l’avait surnommée l’Ange.

Elle jeta tout autour d’elle un regard où il y avait un reste de crainte ; puis elle étendit ses jolis bras demi-nus pour se pendre au cou de sa mère.

— Oh !… dit-elle tout bas, comme cela m’a fait peur !… je l’ai vu ! je l’ai vu !…

Dans le silence contraint qui pesait sur la salle, sa voix arrivait aux oreilles de chacun.

— Sais-tu de qui je parle ?… reprit-elle voyant que sa mère ne l’interrogeait pas ; tu m’as dit souvent combien il était beau et bon !… oh ! je l’ai bien reconnu tout de suite !…

La pâleur de Madame devint plus mate. Sa paupière n’osait point se relever.

Il y avait dans les yeux du maître de Penhoël un feu étrange et sombre.

La bouche pincée de l’homme de loi remuait et disait malgré lui toutes les pensées d’ironie méchante qui traversaient son étroite cervelle.

Les jeunes gens écoutaient, curieux. Cyprienne