Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 2, 1850.djvu/196

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bateau, caché parmi les glaïeuls, sous la loge de Benoît Haligan, et Cyprienne saisit la perche.

L’Oust n’était pas débordée, mais elle coulait à pleines rives et laissait couvertes les parties basses du marais. Tout en perchant, les deux jeunes filles entendaient, parmi le silence de la nuit, le bruit sourd et continu, produit par le tournant de Trémeulé. Dans l’ombre, les vapeurs qui se suspendent au-dessus du gouffre rayonnaient une lueur faible et pâle. Elles voyaient au loin le gigantesque fantôme de la Femme-Blanche qui se balançait et planait sur les eaux tranquilles du marais.

Derrière elles, au-dessus des taillis de châtaigniers, les jardins de Penhoël gardaient leur illumination brillante ; la fête n’était pas finie ; quelques accords, jetés par l’orchestre campagnard, arrivaient, par bouffées, jusqu’à leurs oreilles.

Quand elles touchèrent le bord opposé, nul mouvement ne se faisait remarquer encore du côté du bac, qui allait s’ébranler bientôt pour les poursuivre.

Elles sautèrent lestement sur la rive, et au lieu de prendre la route de Redon, qui les eût conduites à la maison de maître le Hivain, elles se dirigèrent, en courant, vers le marais.