Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 2, 1850.djvu/225

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malheureuse encore, en achevant la série de glapissements déplorables qu’elle appelait son grand air, avait pu constater que le salon de verdure s’était changé en solitude. Seul, le petit frère Numa l’avait écoutée jusqu’au bout, comme c’était son rigoureux devoir.

Dans ces dispositions, la galerie était un peu moins loquace que naguère, mais aussi son venin était plus épais et plus âcre : chaque coup de langue était une morsure.

On allait des grands aux petits ; tout le monde avait son paquet ; on assassinait ceux qu’on n’avait pas daigné piquer au commencement de la soirée.

Personne n’a été sans remarquer que la province, si prude et si peu charitable, ne choisit pas toujours ses expressions parmi les plus châtiées, lorsqu’il s’agit de calomnier ou de médire. Quand la conversation arrive à un certain degré, quand les dents grincent, quand les langues s’aiguisent, la province est comme le latin qui, dans les mots, brave l’honnêteté, et il n’est point rare d’entendre des locutions très-téméraires tomber alors des bouches les plus vénérables.

En ce moment, la société faisait de la calomnie légère. Elle allait de l’un à l’autre, donnant à Lola, par exemple, qui s’affichait avec le jeune Pontalès, des épithètes extrêmement caracté-