Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 2, 1850.djvu/77

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Marthe retira celle de ses mains que tenait la jeune fille pour la porter lentement à son front, comme on fait quand la migraine aiguë et lourde accable le cerveau.

— Nous vous aimons, répéta Diane, et, à cause de cela, l’heure est venue déjà pour nous de penser et de souffrir.

Ses paupières ne se baissaient plus, et ses grands yeux humides se relevaient sur Marthe de Penhoël.

Cyprienne laissait dire Diane, parce qu’il lui semblait que c’était son propre cœur qui parlait. Elle se sentait trop étourdie pour risquer une parole devant cette pauvre femme que l’excès de son malheur rendait ombrageuse et défiante, mais elle enviait tout bas le rôle de sa sœur, et se payait de son silence, la petite jalouse, en tenant ses lèvres collées sur la main de Madame.

Celle-ci n’avait pas voulu soutenir le regard de Diane, qui était une muette question.

— Vous me croyez donc bien malheureuse ?… murmura-t-elle en baissant les yeux à son tour.

Et comme Diane tardait à répondre, cette fois Cyprienne répéta tout bas :

— Oh oui ! bien malheureuse !…

Madame lui retira sa main.

— Qui vous a dit cela ? demanda-t-elle en retrouvant son accent de sécheresse.