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Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 3, 1850.djvu/131

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CHAPITRE II.

yeux. Cette physionomie fière et calme lui semblait méchante, petite, hargneuse.

— Brisons là ! dit-il avec un commencement de colère ; dans notre position, une querelle serait souverainement ridicule… D’ailleurs, je n’en suis pas à savoir que, sur certains sujets, le diable ne ferait pas concorder l’instinct d’un bourgeois et le sens d’un artiste !

— Ah !… ah !… ah !… fit par trois fois l’Anglais ; nous sommes donc artiste, monsieur ?… Franchement, j’en suis fâché pour vous… les bras manquent à la culture de la terre… Il n’y a pas assez de boulangers ; les tailleurs demandent en vain des apprentis… et il se trouve des gens qui n’ont pas honte d’avouer bonnement leur fainéantise… C’est pitoyable !

Étienne frappa du pied et se redressa ; des paroles de défi étaient sur sa lèvre. L’Anglais le regarda encore durant un instant avec son sourire sec et dédaigneux.

Puis au moment où Étienne allait parler, l’Anglais haussa les épaules, ferma les yeux et remit sa tête sur son beau châle de cachemire.

— Pour Dieu ! monsieur, dit-il, ne me réveillez plus… j’ai sommeil.

Étienne demeura tout déconcerté. Il garda le silence, rongeant son frein et se demandant