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Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 3, 1850.djvu/140

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LES BELLES-DE-NUIT.

tante ; ses tardives excuses ne pouvaient effacer qu’à demi la grossièreté de son procédé.

Et puis, qui ne sait que ces excuses, octroyées de bon cœur et sans qu’on les demande, ont l’air parfois d’une aumône faite à la faiblesse ?

Étienne se disait tout cela depuis dix minutes et bien d’autres choses encore. S’il ne pouvait point parvenir à froncer le sourcil, c’est que Montalt le dominait déjà par l’attrait de sa nature séduisante et sympathique.

Mais en ce moment on se moquait de lui par trop à découvert ; sa susceptibilité engourdie se réveilla. Pour répondre à la question du nabab, il tâcha d’aiguiser son sourire le plus railleur.

— Parbleu ! milord, dit-il, nous n’avons pas eu de chance !… Attendre si longtemps pour nous rencontrer, quand nous étions si près l’un de l’autre… Tel que vous me voyez, je suis premier ministre démissionnaire de Sa Majesté le bon roi de Lahore.

— Vous ne me croyez donc pas ?… demanda Montalt sans perdre son sourire ami.

— Pourquoi cela ?

— Parce que vous me répondez comme on fait à ces hâbleurs d’auberge, connus pour raconter des aventures impossibles.

Étienne se pinça la lèvre avec triomphe : le coup avait porté.