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LES BELLES-DE-NUIT.

bonne vie, on jouait gros jeu, on dînait royalement, et la gêne n’avait pas encore montré une seule fois son menaçant bout d’oreille.

Aussi nos cinq étrangers n’étaient-ils pas de ces émigrants à la douzaine qui abandonnent leur pays on ne sait pourquoi. Ils voyageaient, les hommes du moins, pour affaires politiques, et cachaient sous des apparences frivoles le maniement des plus graves intérêts.

Le chevalier de las Matas préparait la révolution qui chassa Ferdinand de Madrid ; le comte de Manteïra jetait les bases de la charte portugaise, et le noble baron Bibander de Berlin venait communiquer aux libéraux de France les précieuses idées de l’illuminisme allemand.

Avec eux voyageait madame la marquise d’Urgel, veuve d’un grand d’Espagne de première classe et sœur du chevalier de las Matas. Cette marquise était une adorable femme, ardente comme une Andalouse et pas plus cruelle qu’une Parisienne.

Elle n’avait habité l’hôtel que durant un mois ou cinq semaines ; après quoi on l’avait vue partir avec une jeune dame, dont il nous reste à parler. Elle demeurait maintenant dans un autre quartier, mais elle venait plusieurs fois par jour à l’hôtel.

La jeune dame qui l’avait suivie, et que nous