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LES BELLES-DE-NUIT.

Mais personne ne prenait garde.

Elles étaient à peu près du même âge : dix-huit à dix-neuf ans. La lueur faible du réverbère montrait leurs figures pâles, mais charmantes, que la souffrance n’avait pas encore eu le temps de flétrir.

Elles n’avaient, pour elles deux, qu’une seule harpe, dont elles jouaient tour à tour.

Leurs costumes étaient propres et gardaient une certaine élégance parmi des indices trop évidents de pauvreté. C’étaient deux petites robes légères, dessinant la grâce exquise de deux tailles souples et jeunes, mais ne pouvant rien contre le vent glacé de cette soirée d’automne.

Leurs coiffures consistaient en de petits bonnets ronds, collants, qui laissaient échapper à profusion le luxe de leurs beaux cheveux, dont les boucles larges et flexibles tombaient jusque sur leurs épaules demi-nues.

Elles étaient belles toutes deux, délicieusement belles malgré la souffrance qui inclinait leurs fronts découragés. Et quand, parfois, elles se regardaient en essayant de sourire, les pauvres filles, pour se donner mutuellement du cœur, il y avait sur leurs jolis visages comme le reflet d’une gaieté passée.

On eût deviné des jours heureux qui n’étaient pas bien loin encore…