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CHAPITRE VI.

nêtes qui gagnèrent trois cents livres de rente à prêter ainsi leur modeste asile, d’où l’on apercevait le dôme des Invalides, le Val-de-Grâce, l’Institut, la Salpêtrière, mais non du tout le mystérieux paradis du nabab.

Le champ était ouvert aux suppositions, aux descriptions apocryphes, à la poésie des nouvellistes rêveurs, et Dieu sait que nul ne se faisait faute d’avoir en poche son petit plan du jardin miraculeux ! On en comptait les berceaux, les grottes et les statues. Plus il était difficile d’y pénétrer, plus il y avait de véritable gloire à dire : « Je l’ai vu. »

Personne ne s’en privait. Et comme le thème descriptif était varié par l’imagination de chacun, l’idée que s’en faisaient les simples dépassait toutes les limites du merveilleux.

Les uns, frottés de saine littérature, refaisaient tout doucement les bosquets d’Armide, ou l’Éden de Milton ; les autres prouvaient certaines connaissances d’histoire naturelle en décrivant les mille plantes des plates-bandes et des corbeilles ; d’autres enfin, prenant soin d’animer la scène, montraient le beau nabab errant sous ses féeriques ombrages, au milieu d’un essaim d’almées.

Car l’idée du sérail de Montalt avait franchi le détroit, et ceux qui avaient aperçu, par hasard, Séid et son noir compagnon, leur confiaient