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LES BELLES-DE-NUIT.

Le lendemain, on le trouvait sur son lit, pâle et brisé de lassitude. On n’osait point lui adresser la parole ; à peine prenait-on le courage de regarder à la dérobée son visage défait et bouleversé.

Ces jours-là, il ne mangeait point. Il restait jusqu’au soir assis sur son divan, tandis que ses deux nègres, immobiles et muets, attendaient ses ordres.

Ceux qui eussent pu pénétrer le secret de sa vie auraient remarqué que ces tristesses mornes et profondes le prenaient chaque fois que les hasards du jeu le forçaient à enlever un diamant au couvercle de sa boîte de sandal.

Et assurément, ce n’était pas la perte elle-même qui le navrait ainsi, car on n’avait jamais vu au Cercle des Étrangers un joueur plus calme et plus impassible.

Les jours dont nous parlons, personne ne pénétrait près de lui, pas même Étienne et Roger qu’il aimait tant à voir d’habitude.

Car, en ceci du moins, le nabab avait fait exception à son inconstance. Cette amitié de hasard, nouée dans le coupé d’une diligence, eût gardé pour bien des gens, dans son origine même, un germe de rupture. Mais, pour Montalt, c’était tout le contraire ; il se disait avec un souverain plaisir que cette liaison n’avait