Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 4, 1850.djvu/68

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
64
LES BELLES-DE-NUIT.

servis selon le code de la gastrologie, ce qui est davantage.

Il faut ici le coup d’œil et la science. Il faut savoir alterner le chaud madère avec le bordeaux, ce roi des vins ; il faut placer à propos le chambertin généreux, le porto, cher aux palais britanniques, le syracuse, le chypre et le lacryma-christi, ces vins romantiques, que l’on boit au théâtre dans des coupes de carton doré ; le constance, fouetté par les tempêtes, et le johannisberg, diplomatique ambroisie, qu’on n’achète, dit-on, qu’avec de l’esprit ou de la gloire.

Quant au champagne, cette pâle et froide potion qui met les collégiens en goguette et fait chanter les étudiants à la barrière, nous aurions pudeur de prononcer son nom bourgeois parmi tant de noms illustres.

On causait fort gaiement déjà. Le baron Bibander, une fois la glace rompue, se prenait à baragouiner d’une si triomphante façon, que le bon Graff était tout fier de son élève.

Montalt avait des prévenances pour chacun, mais il donnait la principale part de son attention à M. le chevalier de las Matas, qui l’entretenait avec une rare vivacité.

Montalt lui répondait, lui souriait, et ne laissait jamais son verre vide.