Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 5, 1850.djvu/100

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
96
LES BELLES-DE-NUIT.

recouvrait lentement la vie ; il s’agitait par intervalles sur son matelas, et c’était maintenant le sommeil de l’ivresse qui l’empêchait d’ouvrir les yeux.

Marthe regarda Robert en face.

— Il ne nous reste rien, monsieur, dit-elle ; je ne sais pas quel intérêt vous avez encore à nous tromper.

— Oh !… fit l’Américain en levant les yeux au ciel, n’ai-je donc pas été assez cruellement puni, mon Dieu ?… Madame, je ne cherche pas à pallier ma faute… je me suis laissé autrefois séduire par les belles paroles du marquis de Pontalès… Je me suis ligué avec lui contre Penhoël… J’ai été dur envers vous, madame… J’ai abusé du secret que le hasard avait mis entre mes mains… mais, sur ma conscience, je vous jure, tout cela n’avait qu’un but… je voulais vous forcer à me donner votre fille que j’aimais… Je me disais : La fortune que j’emprunte, je la rendrai en épousant Blanche… Mon amour était si grand, madame, qu’il excusait tout à mes yeux… Je restais aveuglé, ne voyant que Blanche au monde, et ne m’apercevant pas que Pontalès faisait de moi l’instrument d’une trahison infâme !…

Il s’arrêta, comme si l’émotion qui l’oppressait l’eût empêché de poursuivre. Marthe l’écou-