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grand parc ombreux, tout plein de statues. Moi, j’avais pénétré dans votre demeure à votre insu et malgré vous, comme font ceux qui ont de mauvais desseins.

» J’ai mené la vie des sauvages. Je rampais autour de vous, qui étiez sans défiance, dans l’herbe, comme un sauvage pour être plus près de votre beauté si pure, pour adorer votre sourire quand la lune caressante vient l’éclairer entre deux branches déplacées par le vent du soir ; pour surprendre une harmonie de votre voix, un soupir de votre cœur…

» Où je vous ai vue la première fois ? Le son des orgues passait à travers les murailles de l’église. Ceux qui ont vécu dans les forêts sont attirés par toutes les grandeurs. J’entrai pour entendre le chant qui monte vers Dieu.

» Je priai.

» Ma prière m’ouvrit un coin du ciel, puisque je vous aperçus, et je vous emportai dans mon cœur pour vivre de vous, pour en mourir, peut-être, pour être à vous sur la terre et dans le ciel.

» … Ce soir-là, qui était la seconde fois, dans le bosquet où vous rêviez, j’entendis une parole. Vous disiez : « Si j’étais homme… »

» Vous avez donc besoin d’un défenseur !

» Je voulus m’élancer, mais vous n’étiez plus seule.

» Et depuis lors, je revins tous les soirs ; suis-je un fou ?

» Tous les jours, je vous écris. Voilà bien des fois que