ennuyée, avec cette candeur d’espèce particulière qui se rencontre, dit-on, au sérail. C’est le repos absolu et l’ignorance profonde, enveloppés dans cette ouate morale qui a nom l’inertie.
Volontiers eussiez-vous pris cette chère Domenica pour la sœur aînée du petit qui souriait entre ses bras.
M. de Sampierre aurait donné beaucoup pour savoir ce qu’elle disait à Phatmi, qui l’écoutait d’un air distrait. Il était à son poste, M. le marquis, derrière les rideaux, interrogeant d’un œil avide le mouvement paresseux et lent des lèvres de Domenica, dont les beaux yeux se fermaient à demi.
S’il avait su ! Entre ces fraîches lèvres un nom passait : justement le nom qu’il redoutait le plus !
Domenica disait, mais en réprimant une légère envie de bâiller qu’elle avait :
— C’est danser que j’aimerais ; je n’ai jamais été au bal ; à quoi me sert d’être si riche ? Mon cousin Pernola ne doit pas bien danser, mais Jean de Tréglave, par exemple !…
— Est-ce que vous pensez à lui quelquefois, maîtresse ? demanda Phatmi, qui souriait bonnement.
— Oui, quelquefois. Je m’amusais mieux dans ce grand jardin d’Esterhazi quand il était à sa fenêtre avec Laurent. Je n’ai plus revu Laurent, mais le vicomte Jean nous suit partout. Je crois qu’il est amoureux de moi.
Cette fois, elle bâilla tout à fait. La Tzigane garda le silence. Domenica reprit :
— Elle est donc bien malheureuse, cette Laura-Maria ? Il faudra lui porter encore de l’argent. Princesse Michela