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difficiles à jouer. Laure ne voulait pas qu’on jouât le rôle : elle avait rêvé un comédien de bonne foi qui viendrait heurter son émotion vraie contre la sincère émotion de la mère.

De prime aspect, cela peut sembler subtil, mais une minute de réflexion vous dira que le premier venu parmi les abandonnés remplit à coup sûr les conditions essentielles de l’emploi. Je vous défie de découvrir un seul enfant trouvé qui ne rêve pas quelque poème de grandeur derrière le pauvre brouillard de sa destinée.

Laure chercha, non pas tout à fait aux environs de l’hôpital, mais dans ces lieux où le roman foisonne presque autant que chez Saint-Vincent-de-Paul ; elle chercha partout où l’on s’amuse.

Il y a de ces endroits trop gais où Mme la baronne de Vaudré ne peut guère mettre le pied, au moins ostensiblement. Mais vous souvenez-vous de Mme Marion, la gracieuse châtelaine de Ville-d’Avray ? Celle-ci est femme à entrebâiller toute espèce de porte.

Quoique le bal Mabille ait, en Europe, cette belle renommée d’être le lieu du monde où l’on rencontre le plus de vénérables vieillards, il n’est pas complètement impossible d’y trouver çà et là un jeune homme.

Ce fut là que Laure, sous l’espèce de Mme Marion, pêcha son héritier.

Je dois dire que notre ami Édouard Blunt y était par pure escapade et assez empêché de sa personne, quand la plus charmante femme de l’univers vint au secours de son isolement.

Notre Édouard n’était pas ce qui se peut appeler un