Page:Féval - Les Cinq - 1875, volume 1.pdf/428

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elle toucha la bague et son corps eut dans toutes ses parties un tressaillement bref.

— Écoutez ! fit-elle, vous avez eu de moi ce que nul n’aura plus. Ne vous fiez à personne. Je ne sais pas si votre fils vous aime ; ne vous fiez pas à lui ; ne vous fiez pas à celle que vous appelez votre fille : Charlotte d’Aleix ; ne vous fiez pas même à moi ! Vous êtes trop riche. Et il se peut que vous soyez pauvre quelque jour. Moi, ma tâche est remplie : j’ai tenu la promesse que j’avais faite à mon maître mourant. Prenez garde surtout à l’homme qui porte indignement le nom de Tréglave. J’ai tout dit.

La bague, élevée avec lenteur, vint effleurer sa lèvre et tout aussitôt elle regarda fixement le miroir. Un geste qui n’admettait point de réplique avait réduit Domenica au silence.

Au bout de quelques secondes, Laure se mit sur ses pieds sans efforts ; mais elle fut obligée de chercher le canapé où elle se laissa tomber en riant comme un enfant qui s’est étourdi à force de tourner.

Un instant, elle cacha ses yeux éblouis derrière ses doigts. Avec ses beaux cheveux dénoués et sa robe en désordre, elle était la jeunesse même et jamais Domenica ne l’avait vue si charmante.

— Vous m’avez fatiguée un peu, chère madame, dit-elle. Êtes-vous contente de moi ? Vous ai-je répondu comme il faut ?

Domenica la regardait interdite. Pendant que Laure parlait, la dernière trace de fatigue s’évanouissait. Elle était toute brillante d’insouciance et de gaieté.