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molles. Chez lui, en ce premier mouvement, le courroux était plutôt du désespoir :

Quelque chose de mortel. Une menace muette et sourde, et profonde comme une agonie.

Domenica perdait le souffle à le regarder et à se taire.

Elle voyait, quoiqu’il fût à contre-jour, le poli de sa joue se rayer de rides, le blanc de son front se maculer de taches bistrées. Il lui semblait que ses cheveux soulevés remuaient, agités par un vent. Deux cercles sombres s’élargissaient sous ses paupières, et, par intervalles réguliers, des gouttes de sueur, tombant de lui, mouillaient le parquet.

Domenica ne savait rien des choses de la vie, mais on n’a pas besoin de savoir pour trembler.

Les enfants voient le danger comme les hommes.

Domenica eut la pensée qui devait venir à un enfant. Elle se vit seule et sans défense au pouvoir d’un fou.

Se trompait-elle ? Le marquis Giammaria était-il fou ? Du moins, était-il plus fou aujourd’hui qu’hier ? plus fou maintenant dans son chagrin poignant que tout à l’heure dans la triomphale expression de son allégresse ?

Question oiseuse, assurément, pour la pauvre jeune femme, dont le réveil était cet horrible cauchemar.

Mais question que nous devons souligner parce qu’elle établira aux yeux du lecteur, mieux que la plus minutieuse analyse, l’état exact du cœur et de l’esprit de M. de Sampierre.