Aller au contenu

Page:Féval - Les Cinq - 1875, volume 2.djvu/151

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

défiantes. Elles portent cela comme Savta son sac de cuir de Hongrie : c’est provision de voyage.

L’accueil de la vieille dame fut d’abord poli, mais très-froid, et quand Charlotte manifesta le désir d’attendre M. Chanut, elle eut cette réponse un peu sèche :

— Mon fils sera dehors toute la journée.

Charlotte dit alors son nom qui produisit un médiocre effet. Mme Chanut ne put moins faire, cependant que de prononcer la phrase sacramentelle :

— Si c’est quelque chose qu’on puisse lui dire…

Charlotte hésita. Ce n’était pas du désappointement qui était sur son charmant visage ; on y pouvait lire un sérieux chagrin.

— Madame, répliqua-t-elle après un silence, je vous parlerai, si vous le voulez bien. J’apportais ici une grande espérance…

Il y eut dans l’accent de ces dernières paroles quelque chose qui serra la poitrine de Mme Chanut. Elle désigna un siège auprès de son embrasure et reprit elle-même son fauteuil.

Savta, essoufflée, s’était assise au coin de la porte. Elle n’avait point de fierté mal placée. Comme elle avait la bonne habitude de sommeiller un peu, chaque jour, après son déjeuner, elle s’endormit tout de suite pour ne point changer ses heures.

Charlotte parlait tout bas.

Au bout de trois minutes, Mme Chanut, qui avait d’abord repris son ouvrage, le déposa sur le guéridon.

Elle ôta ses lunettes pour mieux regarder Mlle d’Aleix.