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près d’être réalisé, un espoir certain, le bonheur si voisin que les parfums en arrivaient déjà jusqu’au cœur !

Reynier se sentait heureux si profondément qu’il avait crainte.

Il aimait bien, quoique son amour ne fût pas de ceux qui s’expriment avec des paroles ardentes.

Ils n’ont rien à dire, ces amours qu’on porte en soi comme une nécessité, qui font partie de l’être comme le sang et la chair qui vivent parce qu’on vit, n’ayant pas commencé, ne devant pas finir.

Leur éloquence n’est pas au dehors, ils s’affirment par la joie résistante et robuste.

Aussi sont-ils offensants parfois pour autrui comme la trop bonne santé. Les dames ne les regardent pas d’un œil bienveillant.

Il faut les poignarder, ces amours, pour les rendre intéressants.

La concierge de la rue Vavin, qui avait à la vitre de sa loge un petit écriteau demandant des poseuses « pour le corps », entra et dit qu’une dame venait s’offrir.

Elle prononça le mot dame d’une certaine façon. D’ordinaire, elle appelait les jeunes personnes qui servaient de modèles des « loueuses de viande. »

C’était dur, mais Mme Malagraux avait beaucoup de vertu. Elle ne laissait entrer chez le vieux professeur du premier étage que les petites demoiselles