Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/202

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lonel Bozzo-Corona, qui vous fit accomplir une très mystérieuse besogne, en prenant la liberté de ne vous point confier son secret. Il fut content de vous, à ce qu’il semble, car vous reçûtes une récompense royale, non pas seulement en argent, mais en crédit, en relations, en succès. Est-ce vrai ?

— C’est vrai. Je n’ai jamais songé à nier ma dette.

— Mais vous avez songé à la payer, toujours à la manière de notre mère Ève, à qui le Seigneur avait dit : Tout est à toi, excepté la pomme, et qui n’avait faim que de la pomme. Chère femme ! vraie femme ! nous sommes tous ses enfants.

Le malaise de Carpentier était visible, néanmoins il voulut protester.

— J’affirme, dit-il, que je n’ai rien à me reprocher vis-à-vis du colonel Bozzo-Corona.

— Et moi, j’affirme, riposta l’inconnue, qu’Ève, ma mère, n’aurait jamais mordu à la pomme si l’arbre avait eu seulement trente pieds de hauteur, dans ce pays primitif, qui manquait d’échelles… Ah ça ! croyez-vous donc être seul sous l’arbre, bon M. Carpentier ? Et ne vous doutez-vous pas un peu que l’immense trésor pour lequel vous avez maçonné une tirelire est convoité par d’autres que vous.

Elle avait prononcé ces dernières paroles d’un ton sérieux et tranchant.