Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome II.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Irène, je pourrais être votre mère… vous ne niez pas ! J’espérais pourtant que vous auriez nié. Reynier est un noble et cher cœur. Il ne vous accuse pas. Il cesserait de croire en Dieu avant de perdre la foi qu’il a en vous.

— Je n’oublierai jamais Reynier, dit Irène, j’ai pour lui la tendresse d’une sœur.

La comtesse lâcha la main qu’elle tenait, et prononça tout bas :

— Nous sommes toutes les mêmes, ma fille. C’est avec ce mot-là que nous tuons ceux qui nous ont donné leur âme.

— Reynier vous a-t-il donc fait ses confidences ? interrogea Irène avec une nuance d’ironie, qui avait sa source dans l’effort qu’elle faisait pour contenir sa colère.

Au lieu de répondre la comtesse Marguerite continua :

— Notre roman, à nous autres femmes, varie peu. Les détails changent, le fond reste le même. Nous frappons Reynier avec une impitoyable dureté, parce qu’il nous aime, mais l’autre nous le rend au centuple, parce que…

— Madame, interrompit encore Irène dont les joues étaient couvertes de rougeur.

— Parce que, acheva la comtesse, l’autre ne nous aime pas.

— Lui ! s’écria Irène, ne pas m’aimer !