Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome II.djvu/180

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plômés qui prétendent au monopole de la sagesse et de la raison, a exercé une influence funeste sur la destinée de votre père. En disant cela, je ne vous étonne plus. Apprenez-moi jusqu’à quel point vous étiez informée avant ma visite d’aujourd’hui ?

— Madame, répliqua Irène, dominée désormais par une profonde émotion, je ne sais pas si je fais bien, mais quelque chose me force à vous obéir. Le quatrième jour de notre arrivée aux mines, nous trouvâmes mon père bien malade. Sa fièvre ne fit qu’augmenter le lendemain. Il avait le délire et prononçait des paroles que j’entendais tomber de sa bouche pour la première fois. Ai-je besoin de vous le redire ? Il voyait des brigands, un meurtre, un trésor dont il faisait la description.

— Et qu’il désignait ? Il parlait du trésor de la Merci ?

— Oui, ce nom revenait sur ses lèvres, et dans ses moments lucides il nous interrogeait Reynier et moi, comme s’il eût craint d’avoir parlé ; on eût dit qu’il avait peur de trahir quelque redoutable secret.

— Et c’est alors que l’idée de la folie naquit en vous ?

— J’aime mon père pour deux, madame. C’est à peine si j’ai connu ma mère.

— Remerciez Dieu pour cette tendresse, ma fille. Elle sera votre salut.

— Je vous en prie, madame, dites-moi le danger