Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome II.djvu/419

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Mais vient une heure où tout cœur saigne, parce qu’un voile de deuil pèse sur le front de la patrie : chacun se recueille au fond de sa tristesse. On se sent d’autant plus humilié qu’on était plus fier, d’autant plus faible qu’on se croyait plus fort. La conscience alors s’éveille.

Et l’on se demande, dans l’étonnement d’une chute qui semblait impossible : D’où vient ce désastre inouï ?

Les faits répondent, et voici ce qui se dégage de leur lamentable clameur :

Ce n’est pas l’ennemi qui nous a vaincus, c’est le vol.

L’or nous a tués, l’or nous a damnés. Notre armée dédoublée avait une réserve en papier, nos fusils ne partaient pas, nos cartouches contenaient du son ; pas de fourrage pour nos chevaux, pas de pain pour nos hommes ; des uniformes en amadou, des souliers dont la semelle était faite avec de vieilles gazettes…

Car les crimes de l’or sont ainsi : horribles autant que grotesques.

Partout la fraude glaçant le courage, le vol paralysant l’héroïsme ; partout l’or, l’ignoble soif de l’or acharnée comme un cancer au sein de la patrie expirante !

On dit même que les mains crochues allèrent plus loin que le vol, et qu’il y eut des hommes, des fem-