Aller au contenu

Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/307

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— C’est moi qui ai apporté l’affaire, répliqua le marquis d’un air piqué.

— Oui, comme le facteur apporte une lettre cachetée. Je m’intéresse à vous, mon très cher. Il faut voir plus loin que le bout de son nez, dans nos bureaux. Le roi pourrait tirer un avantage… Vous allez comprendre que ce misérable Lecoq est tout uniment une tête politique. Admettez que toute cette histoire de Dauphin soit établie judiciairement, et il a trois fois plus de preuves qu’il n’en faut pour cela, si la bonne volonté s’en mêle : voilà un roi légitime….

— Précieux résultat !

— Tâchez de suivre : Ce roi-là étant légitime, l’autre roi légitime tombe à l’eau ; Henri V devient un pur factieux. Et voulez-vous me dire ce qui manque aux cinq-sixièmes et demi des respectables têtes composant votre parti pour tourner casaque à leur foi ? car vous ne vous flattez pas d’être le seul de votre espèce, je suppose… Vous avez tourné casaque…

— Il manque, dit Gaillardbois qui rougit, un prétexte.

— Le voici ; le prétexte ! Voici mieux qu’un prétexte ! Voici une nécessité qui fait crier le principe même sur lequel votre ancien parti perche comme un perroquet sur son bâton. La branche aînée n’est plus que la branche d’Artois…

— Mais ce nouveau prétendant vous gêne autant que l’autre !

— Pas fort ! Lecoq vous envelopperait dans son mouchoir de poche. Ce nouveau prétendant est un gentil garçon qui se contente du titre de premier prince du sang, avec plus ou moins de millions de revenus, un château royal pour résidence, un palais pour hôtel, Charles-Quint, moins le froc : un roi douairier…