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Page:Féval - Les Nuits de Paris - 1880, volumes 1 et 2.djvu/119

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LES NUITS DE PARIS.

noirs comme l’ébène, s’avançait une litière ornée de draperies magnifiques.

Cette litière contenait un homme et une femme.

Une femme jeune, offrant le type pur de la beauté grecque et vêtue suivant la mode hardie, qui alliait les fantaisies d’Athènes aux caprices de Rome.

Un homme jeune aussi et plus beau, car aux lignes rigides du dessein grec, il unissait les courbes riches et larges du type oriental.

La femme avait nom Mysœis et l’homme Priscillus Œlianus.

Mysœïs était l’esclave, c’est-à-dire la maîtresse de César.

Priscille Œlian était l’affranchi de César, c’est-à-dire…

Mais pourquoi égarer sa plume à décrire minutieusement ces mœurs plus que bizarres que le christianisme allait balayer comme une fange ?

Sous l’empire des faux dieux, ces mœurs pouvaient s’allier à la vertu la plus austère.

Et nos professeurs universitaires, dont les réminiscences païennes sont de plus d’un genre, nous ont forcé d’admirer un tas de coquins, grecs ou latins, qui poussaient la philosophie jusqu’à des raffinements qui sont désormais du domaine de la cour d’assises.

À ce propos, ô Gaulois, mes frères, j’offre une récompense généreuse à qui voudra me dire et me prouver que les professeurs sont d’une utilité quelconque en cet univers.

À qui me prouvera que j’ai tort en les accusant publiquement (sauf exceptions confirmant la règle), d’ignorance burlesque et d’immoralité.

Car ces païens de collège n’ont-ils pas offert pêle-mêle à notre adoration enfantine le vice et la vertu ? le courage et la lâcheté ? la continence et la débauche ?

Ne nous ont-ils pas complaisamment révélé le côté trop obligeant d’Alcibiade et le côté faible de Socrate ?