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Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/133

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jetée à son cou et j’ai voulu lui dire : « Maurice, Maurice, je te sauverai ! »

Mais ses lèvres m’ont fermé la bouche, et je crois l’entendre encore prononcer cette parole qui me poursuit partout : « L’espoir fait mal, n’espère pas, Fleurette, fais comme moi, résigne-toi. »

La veuve luttait contre les sanglots qui l’étouffaient.

— Il m’a demandé, poursuivit Valentine : « Pourquoi maman Léo n’est-elle pas venue ? »

— Oh ! le cher enfant a-t-il douté de moi ?

— Non, pas plus que moi ; nous avons cherché ensemble les raisons de votre absence.

— Je ne savais pas, balbutia la veuve. Comment dire cela, moi qui vous aime tant ! je fermais les yeux pour ne pas vous voir trop heureux…

— Trop heureux ! répéta Valentine, dont le regard se leva vers le ciel. Mais le temps passe et je n’ai plus beaucoup de force. Ce n’est pas moi qui m’oppose à tout projet d’évasion, c’est lui. Il m’a dit : « Je n’ai fui qu’une fois en ma vie, c’est trop, je subirai mon sort. »

« Et tout ce que Maurice veut, je le veux…

Elle s’arrêta encore.

— Est-il bien changé ? demanda la veuve.

— Non, il est très pâle ; mais il y a dans son regard une sérénité presque divine, et j’ai retrouvé son beau sourire quand il m’a dit :

« Si tu étais ma femme, je mourrais content. »