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Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/144

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du péril, le sang-froid, l’adresse, la présence d’esprit d’une vraie femme.

Elle reconnut autour de la cheminée du salon toutes les figures qui naguère étaient rassemblées dans la chambre de la malade.

Il y avait en plus un personnage qui lui était inconnu et qui causait tout bas avec le colonel Bozzo.

En entrant, elle put entendre la marquise reprocher un retard ou une absence à ce nouveau venu, qu’elle appela : M. le baron de la Périère.

À cet instant, maman Léo avait déjà dompté en grande partie son horreur et sa frayeur ; comme il arrive à tout bon soldat, la présence de l’ennemi lui rendait son courage.

En outre, le sentiment de curiosité si vif dans les classes populaires, où il y a toujours de l’enfant, s’éveilla en elle brusquement ; aussitôt qu’elle cessa d’avoir peur, elle eut envie de voir et de savoir.

Son regard fit le tour de l’assemblée, et certes, chaque visage fut jugé par elle tout autrement que la première fois.

Rien ne perçait au-dehors de ce qui l’agitait intérieurement ; il y avait un pied de rouge sur ses bonnes grosses joues, mais c’était assez l’habitude, et d’ailleurs, chacun pouvait faire la part du trouble tout naturel éprouvé par une femme de sa sorte, admise dans ce monde si fort au-dessus d’elle.

Un peu de crainte et beaucoup de respect étaient assurément de mise.

Mme la marquise d’Ornans vint la prendre par la main et tout le monde l’entoura, excepté le colonel Bozzo, qui garda sa place, continuant de causer à voix basse avec M. le baron de la Périère.