Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/30

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Échalot le regarda d’un air attendri et murmura :

— Quelle dorure de langue ! Ah ! si j’avais son talent ! mais tout le monde ne peut pas jouir des mêmes facultés.

— Silence dans les rangs ! ordonna Gondrequin-Militaire.

Mme Samayoux elle-même crut devoir une explication à l’étonnement de ses sujets.

— Le garçon dit vrai, murmura-t-elle en accordant un geste approbateur à la flatterie de l’adroit Similor, ma tête travaille et ça fait mon malheur. Vous avez raison, vous aussi, monsieur Baruque, je reviens de loin, de trop loin. Ça semble aujourd’hui que je suis une étrangère au sein de ma patrie, puisque je ne sais rien de la nouvelle du moment que les plus naïfs paraissent en avoir connaissance. C’est comme ça, entendez-vous, je ne sais rien de rien, sinon ce que je viens de saisir à la volée, et je vas vous dire une chose : si j’en avais su seulement, depuis le temps, gros comme le bout du petit doigt, je saurais tout, car ça intéresse la tranquillité de mon existence.

Involontairement, le cercle se rapprocha et l’on put entendre des voix qui chuchotaient :

— Est-ce que la patronne serait mélangée à ces affaires-là ?

— Commence donc par le commencement, reprit la dompteuse en s’adressant toujours à M. Baruque ; les noms !

Gondrequin-Militaire, qui était une bonne âme, lui prit la main, qu’il serra à tour de bras.

— C’est l’instant, c’est le moment, dit-il tout bas, fixe ! et tenez-vous ferme dans