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Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/348

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sang d’Échalot lui-même avait fini par bouillir.

Ce fut une terrible joute.

À les voir enlacés corps à corps, tantôt debout, tantôt à genoux, tantôt roulant comme un seul paquet dans la poussière et semblables à deux serpents qui câblent leurs anneaux, un profane aurait cru qu’ils avaient mis de côté toutes les ressources de l’escrime populaire pour s’attaquer comme les loups affamés se mangent.

Il n’en était rien, le nageur qui tombe à l’eau fait les mouvements voulus, d’instinct et sans savoir.

Sans savoir et d’instinct, ils se battaient avec une redoutable adresse. Il y avait, jusque dans la bestialité de leur accolade, la science de la lutte, la maîtrise du pugilat.

Seulement, Échalot restait loyal dans le paroxysme de sa colère, tandis que Similor, au plus furieux de son enragée démence, essayait de tricher et de trahir.

Il n’y avait pas de témoins pour voir ce combat hideux, mais curieux, qui se prolongeait en silence. On n’entendait que les respirations de plus en plus oppressées et qui sifflaient comme des râles.

De temps en temps un coup retentissait, mais pas souvent, car leurs mains étaient étroitement engagées.

Échalot était le plus fort ; en un moment où il tenait Similor sous lui, il poussa un cri étranglé.

— Ne mords pas, Amédée, dit-il, ou je t’écrase !

— Assassin ! gronda celui-ci, qui parvint à rejeter sa tête de côté.

Il avait la bouche rouge et humide comme un chien qui vient de faire curée.