Page:F.Douglass, Mes années d'esclavage et de liberté, 1883.djvu/49

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Pas un murmure ; seulement, à chaque sanglée, les vieilles épaules tressaillaient.

La souffrance physique était-elle excessive ou non, je n’en sais rien ; mais ce que je sais, c’est que peu de scènes m’ont pénétré d’une plus poignante horreur que le spectacle de ce vieillard, à genoux devant son maître, qui le sanglait.


Entre le planteur et les esclaves, telle était la distance, que ni celui-ci ne les connaissait tous, ni ceux-là ne l’avaient tous vu !

Le colonel, chevauchant un jour à travers ses possessions, rencontre un noir. Il lui adresse la question habituelle :

— Garçon, à qui appartiens-tu ?

— Au colonel Lloyd.

— Te traite-t-il bien ?

— Non.

— Vous fait-il rudement travailler ?

— Oui.

— Vous donne-t-il suffisamment à manger ?

— Oh ! pour la nourriture que c’est, il y en a assez.

Le colonel suit sa route, l’esclave son sentier. Il ne s’était douté de rien, ne pensait plus à l’aventure et ne l’avait communiquée à personne, lorsque, mandé en présence du surveillant — trois semaines plus tard — ce haut personnage lui déclare que, pour s’être permis des critiques à l’endroit du maître, il est vendu, et va filer en Géorgie.

Chargé de chaînes, menottes aux poignets, violem-