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précédé dans la chevauchée de l’histoire, depuis le Brenn intrépide, héros expiatoire, qui s’offrit en holocauste pour que vive notre patrie, jusqu’à l’austère chancelier, précurseur et frère spirituel des fondateurs de Port-Royal, qui venait de mourir en disgrâce.

Ainsi Pascal puisait au livre de la vie le grand enseigne ment, l’enseignement qu’il proclamait supérieur à ceux de toutes les scolastiques et de toutes les philosophies. Il sentait, dans sa vivante acuité, le douloureux contraste entre l’éternelle jeunesse de la nature et la brièveté de nos pauvres vies humaines, il sentait, écrasé par l’immensité de l’espace et du temps, toute notre faiblesse et notre fragilité.

Alors, le cœur serré, mais l’âme éblouie, il redescendait vers la maison paternelle qu’hélas aujourd’hui nous cherchons en vain, vers la calme demeure serrée contre les arcs-boutants de la vieille cathédrale gothique.

C’est là qu’il puisait, dans le calme des longues veillées familiales, la sève même de la race. Au souvenir d’une mère trop tôt disparue, mais restée l’âme gardienne du foyer, auprès de ses sœurs exquises, Gilberte et Jacqueline, il acquerrait sa sensibilité, son émotivité féminine devant la souffrance et la misère humaines, son penchant mystique et sa faculté de pouvoir, d’un coup d’aile, comme l’alouette gauloise, monter des gouffres obscurs vers la splendeur sereine des sommets.

Au contact d’un père sévère, nourri de droit et de science, il apprenait la pratique des vertus stoïciennes, le respect des données de l’expérience, le culte de la justice et de la raison. Il aiguisait l’esprit d’indépendance et l’ardeur combattive qui furent la force du grand polémiste des Provinciales.

Ainsi se modelait son âme, ainsi elle recevait l’ineffaçable empreinte du pays, de la race, du milieu familial : âme faite de contrastes, éprise de réalisme, mais hantée par les mystères de l’au-delà, cœur ardent de visionnaire, mais esprit de mesure et de méthode ; se laissant tantôt bercer dans la félicité d’une foi naïve, par la douce chanson apprise sur les genoux de sa mère, tantôt s’appliquant durement à